Dans un contexte de tensions persistantes à l’hôpital public, la question de la rémunération des heures supplémentaires effectuées par les soignants revient sans cesse sur la table. Malgré l’engagement quotidien du personnel hospitalier, nombreux sont ceux qui ne voient pas leurs heures réellement travaillées reflétées sur leur fiche de paie. Pourquoi cette injustice perdure-t-elle ? Quels sont les freins structurels et organisationnels à une rémunération juste et transparente ? Décryptage.
Des heures invisibles, mais bien réelles
Les soignants – infirmiers, aides-soignants, agents, médecins – cumulent régulièrement des heures supplémentaires, souvent par nécessité face au manque de personnel. Ces heures supplémentaires ne sont pas un luxe : elles garantissent la continuité des soins. Pourtant, leur reconnaissance financière reste aléatoire.
Dans certains établissements, il n’est pas rare que les heures déclarées ne correspondent pas à celles réellement effectuées. Parfois, elles ne sont même pas déclarées du tout, faute d’outils adaptés ou de procédures claires. Ce phénomène engendre une accumulation de “temps invisible”, pourtant indispensable au fonctionnement de l’hôpital.
Des outils de suivi obsolètes
Le suivi des plannings et des heures travaillées repose encore trop souvent sur des tableaux Excel, des feuilles volantes ou des logiciels peu interopérables. Résultat : les données sont éparpillées, difficiles à centraliser, et les erreurs ou oublis sont fréquents.
Sans un système unifié et fiable de gestion du temps, il devient presque impossible pour les gestionnaires RH ou les cadres de santé de valider les heures supplémentaires de manière juste. Cela alimente un sentiment d’injustice chez les soignants, qui se sentent oubliés ou mal considérés.
Une équation budgétaire complexe
Même lorsque les heures supplémentaires sont bien identifiées, leur paiement pose un problème budgétaire. L’hôpital public, soumis à des contraintes financières strictes, doit jongler entre des dépenses incompressibles et des budgets serrés. Résultat : les heures supplémentaires sont parfois reportées, voire “récupérées” en jours de repos, sans que cela réponde toujours aux besoins ou aux souhaits du personnel.
Ce mode de gestion, s’il peut sembler pragmatique, est déconnecté de la réalité du terrain : comment récupérer des heures quand le manque d’effectifs empêche de poser un jour de repos ?
Et maintenant ? Vers une réforme en profondeur
Face à cette situation, plusieurs pistes existent :
Moderniser les outils de gestion des plannings et des temps de travail, pour offrir une vision claire, centralisée et fiable
Repenser les budgets en intégrant les heures supplémentaires comme une réalité structurelle, et non comme une variable d’ajustement
Impliquer les soignants dans le suivi de leur temps de travail, pour plus de transparence et de confiance
Il est temps que les heures supplémentaires cessent d’être un angle mort de la politique hospitalière. Car derrière chaque heure non payée, il y a un soignant fatigué, démotivé, et parfois sur le point de quitter le service public.
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