45 minutes. Ce n’est pas le temps moyen pour se rendre à son travail, c’est la durée de trajet nécessaire à 4,4% de la population française pour aller consulter un cabinet de pédiatre, d'ophtalmologue, de gynécologue ou de psychiatre.
Aujourd'hui, ce sont même 8 millions de Français qui vivent dans ce que l’on définit comme un désert médical et qui ne peuvent pas consulter plus de deux fois par an un praticien, faute d'en avoir un à proximité.
La situation est encore plus alarmante dans certaines petites communes françaises.
En témoigne celle de Mérindol, dans le Vaucluse, où le maire a installé mi-mai à l’entrée de son village de 200 âmes une grande banderole où était inscrit : “Urgent, la commune de Mérindol recherche pour la future maison médicale un médecin généraliste".
Au total, selon le ministère de la Santé, il manque des médecins généralistes dans 11 329 communes de France, soit une ville sur trois.
La médecine générale peu choisie par les étudiants
La cause du problème est sensiblement connue. Ce phénomène est notamment dû au niveau insuffisant du numerus clausus, c’est-à-dire le nombre d’étudiants en médecine accédant à la 2ème année, pendant les années 1990.
Ainsi, seuls 8 000 nouveaux praticiens sont formés par an, contre 13 000 en 1970, alors que les départs à la retraite ont été multipliés par six en dix ans.
Et ils devraient concerner près de 7 000 généralistes ou spécialistes en 2024.
En outre, même avec un nombre croissant de docteurs formés, la médecine générale fait malheureusement partie des dernières spécialités choisies parmi les étudiants qui préfèrent majoritairement se spécialiser.
Et parmi ceux qui embrasseraient la carrière de médecin généraliste, seulement 3% d’entre eux souhaitent exercer de manière
isolée.
Le plan “Ma Santé 2022”
Pour répondre à cette crise, le gouvernement a d’abord lancé en 2012 le Pacte territoire-santé avant d’entamer une réforme globale des soins de proximité, présentée en octobre 2017 par le Premier ministre et la ministre des solidarités et de la santé.
La stratégie “Ma Santé 2022” prévoit notamment de labelliser 500 à 600 hôpitaux de proximité.
Autre remède, favoriser le cadre des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) qui permettent aux professionnels de santé libéraux d’un même territoire de s’organiser entre eux pour répondre aux besoins de santé de la population.
Ensemble, ils peuvent par exemple garantir l’accès à des consultations sans rendez-vous en journée ou encore attribuer des médecins traitants à des patients qui n’en ont pas, dans une logique de responsabilité collective. Fin 2018, on recensait plus de 200 projets de CPTS sur l’ensemble du territoire.
Déléguer des compétences à d'autres professions médicales
Consciente que ces mesures doivent être accompagnées pour passer à la vitesse supérieure, la ministre de la Santé a promis de prendre ce problème de désert médical à bras-le-corps. Agnès Buzyn a d’abord donner un coup de pouce au cumul emploi-retraite des médecins.
La ministre a également promis de “libérer du temps médical”, en déléguant certaines compétences à d'autres professions médicales.
En témoigne les 700 000 vaccinations contre la grippe réalisées à titre d’expérimentation par des pharmaciens.
Cette prise en charge sera d’ailleurs généralisée pour la prochaine saison grippale à l’automne 2019.
Enfin, 400 généralistes salariés devraient être recrutés en zone sous-dense dans le courant de cette année.
Imposer le lieu d’exercice ?
Pour mettre fin aux déserts médicaux, certains prônent une solution encore plus radicale : imposer aux médecins leur lieu d’exercice.
Selon un sondage Ipsos, 84 % des Français sont d’ailleurs favorables à une répartition équitable des jeunes médecins sur l’ensemble du territoire français. Mais de là à l’imposer, cela paraît plus compliqué, d’autant que les médecins généralistes ne sont pas des fonctionnaires mais des libéraux.
Il est donc a priori impossible de les affecter dans tel ou tel cabinet, comme on le ferait pour des professeurs de collèges publics.
De plus, cela entraînerait encore plus le report des étudiants en médecine générale vers d’autres spécialisations.
On le voit, les remèdes sont difficiles à trouver.
Aujourd’hui, le gouvernement, les professionnels de la santé comme les patients espèrent que le plan “Ma Santé 2022” réussira enfin à guérir ce mal des déserts médicaux.
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